La décision de la France de durcir les conditions d’octroi des visas pour les citoyens marocains est injustifiée et ne reflète pas la réalité de la coopération consulaire en matière de lutte contre l’immigration illégale, a souligné, mardi à Rabat, le ministre marocain des Affaires étrangères, Nasser Bourita. »Nous avons pris acte de cette décision et la considérons comme injustifiée pour nombre de raisons, dont la première est que le Maroc a toujours traité la question de la migration avec la logique de responsabilité et le nécessaire équilibre entre la facilitation de la circulation des personnes (Étudiants, hommes d’affaires et autres..), la lutte contre l’immigration clandestine et le traitement ferme réservé aux personnes en situation irrégulière », a soutenu M. Bourita lors d’une conférence de presse à l’issue d’un entretien avec son homologue mauritanien, Ismaël Ould Cheikh Ahmed.
Dans le cadre de cette approche, le Maroc agit en responsable, souligne M. Bourita, précisant que la totalité des demandes introduites par les autorités françaises à ce sujet a été traitée.
Le ministre a affirmé à cet égard que 461 laisser-passer ont été remis aux personnes qui étaient en situation irrégulière et que 128 personnes d’entre-elles ont été admises, précisant que le Maroc conditionne le retour de ses ressortissants au fait qu’ils disposent d’un passeport ou d’un laisser-passer, et dans le sillage de la pandémie de la covid-19, le Royaume exige en plus un test PCR négatif pour pouvoir accéder au territoire national.
Ce que la France ne déclare pas, a-t-il noté, c’est que nombre d’individus disposant de documents de voyage n’ont pas pu rentrer au Maroc car refusant de réaliser ce dépistage, facultatif en France, qualifiant ainsi d' »inappropriée » l’adoption du paramètre du refus de la délivrance des déclarations consulaires nécessaires au retour des émigrés.
Le problème est franco-français car si la loi française ne permet pas à ses autorités d’obliger les émigrés à se soumettre à ce test pour leur rapatriement, le Maroc n’acceptera pas non plus de changer ses lois pour permettre aux personnes venant de France d’accéder à son territoire sans se faire dépister, a-t-il détaillé.
Toutefois, la décision de la France reste souveraine mais les raisons qui la motivent nécessitent précision et débat, car ne reflétant pas la réalité de la coopération consulaire entre les deux pays en matière de lutte contre l’immigration illégale, a insisté le ministre, affirmant que le Maroc suivra de près cette décision.
Toute en précisant que la décision française a été prise sans aucune concertation ni information préalables du Maroc, M. Bourita a souligné que la gestion de la question migratoire doit être immunisée des contextes politiques internes et ne doit pas subir les conjonctures politiques et électorales.
Dans une mesure sans précédent, la France a décidé de durcir les conditions d’octroi des visas à l’égard du Maroc, de l’Algérie et de la Tunisie, annoncé ce mardi matin le porte-parole du gouvernement français Gabriel Attal sur Europe1.
Derrière cette décision : le « refus » de ces pays de délivrer les laisser-passer consulaires nécessaires au retour des immigrés refoulés de France, a-t-il précisé.
« C’est une décision drastique, c’est une décision inédite, mais c’est une décision rendue nécessaire par le fait que ces pays n’acceptent pas de reprendre des ressortissants que nous ne souhaitons pas et ne pouvons pas garder en France », a-t-il justifié.
Paris reproche aux trois pays du Maghreb de « freiner l’efficacité des reconduites effectives » à la frontière une fois les obligations de quitter le territoire français (OQTF) délivrées. « Il y a eu un dialogue, ensuite il y a eu des menaces, aujourd’hui on met cette menace à exécution », a ajouté le porte-parole du gouvernement.
Interrogé sur la durée d’application de cette mesure, temporaire ou pérenne, Gabriel Attal a indiqué qu’elle avait été « décidée il y a quelques semaines » et « va être mise à exécution » pour « pousser les pays concernés à changer de politique et accepter de délivrer ces laisser-passer consulaires ». « On souhaiterait que la réaction soit davantage de coopération avec la France pour qu’on puisse faire appliquer nos règles migratoires », a insisté Gabriel Attal.
Techniquement, la France a décidé de diviser par deux le nombre de visas délivrés pour l’Algérie et le Maroc, et de 30% pour la Tunisie.