Lomé, 4 février 2025 — Sous les lambris austères de la Cour constitutionnelle togolaise, un changement de garde institutionnel s’est opéré hier, marquant un tournant discret, mais significatif dans l’architecture électorale du pays. En effet, Kassoumina-Hadabia Barène, désignée par le parti Nouvel Engagement Togolais (NET), a revêtu l’étole symbolique de membre de la Commission électorale nationale indépendante (CENI), succédant ainsi à Atto-Mensah Nokabou, issu des mêmes rangs politiques. Une passation qui, loin d’être une simple formalité, s’inscrit dans un ballet législatif précis, où chaque pas est chorégraphié par le Code électoral.
Barène : un serment sous le regard des arcanes du pouvoir
Par ailleurs, devant une assemblée composée d’autorités politiques, administratives et de représentants de partis, la nouvelle membre a prononcé un serment d’impartialité d’une rigueur presque liturgique : « Je jure solennellement de remplir fidèlement et en toute impartialité les fonctions de membre de la CENI dans le respect de la Constitution, du Code électoral, des lois et règlements en vigueur. » Une formule immuable, mais dont chaque syllabe résonne comme un engagement à arracher la confiance d’un public souvent sceptique face aux mécanismes électoraux. Ainsi, ce geste solennel, accompli sous le regard scrutateur des gardiens de la démocratie togolaise, scelle son entrée dans un cercle où l’équilibre entre loyauté partisane et neutralité institutionnelle reste un fil d’équilibriste.
Remplacement en temps de vacances : entre légalité et pragmatisme
En outre, les autorités ont nommé Barène conformément à un article méconnu du Code électoral, qui prévoit que, en cas de départ anticipé, de démission, de décès ou d’empêchement définitif d’un membre de la CENI, elles doivent assurer son remplacement sans délai. Un mécanisme de substitution activé ici en période de vacances parlementaires, permettant à la Commission elle-même de valider la proposition du parti concerné. Une procédure d’exception qui, bien que conforme aux artifices légaux, soulève des interrogations sur l’autonomie réelle de l’institution face aux influences partisanes.
La CENI, un collège de 17 sages sous tension
Avec cette entrée, la CENI maintient sa composition pléthorique de 17 membres, un chiffre qui, depuis leur élection par la représentation nationale en mars 2022, fait débat. Certains y voient une richesse pluraliste, d’autres un collège décisionnel parfois englué dans des logiques de compromis. Barène rejoint ainsi une instance clé, garante de la crédibilité des scrutins dans un pays où chaque élection est un acte de foi collective autant qu’un champ de tensions politiques.
Enjeux d’une nomination : continuité ou rupture ?
Si le NET, formation de la majorité présidentielle, assure que ce remplacement s’inscrit dans une logique de continuité apolitique, des observateurs relèvent le caractère stratégique du timing. À moins d’un an des prochaines échéances locales, certains pourraient interpréter la présence d’une figure issue des rangs majoritaires au sein de la CENI comme le positionnement d’un pion sur l’échiquier institutionnel. Toutefois, la nouvelle membre devra incarner un paradoxe : être à la fois l’émanation d’un parti et l’arbitre intransigeant des règles du jeu démocratique.
Kassoumina-Hadabia Barène : l’ombre portée des urnes
Kassoumina-Hadabia Barène entre dans l’arène électorale togolaise avec un mandat aussi exaltant que périlleux. Son serment, bien plus qu’un rite protocolaire, est un pacte avec la transparence, dans un contexte où chaque décision de la CENI est disséquée sous la loupe de l’opposition et de la société civile. Gageons que sa trajectoire saura éviter les écueils des intérêts partisans pour naviguer vers le large de l’intégrité, une exigence non négociable pour des élections crédibles, seules capables de sanctifier le verdict des urnes.
Dans les couloirs de la Cour constitutionnelle, certains chuchotent déjà que cette nomination est un baromètre de la maturité démocratique du Togo. Entre les lignes du Code électoral et les réalités du terrain, Kassoumina-Hadabia Barène incarne désormais l’équilibre fragile entre la lettre de la loi et l’esprit du peuple.