JudiciaireJustice




Togo : Dix ans de prison pour quatorze manifestants, un verdict contesté

Dans une atmosphère lourde d’attente et de crispation, la Cour d’assises de Lomé a rendu, dans la nuit du lundi…

Togo : 14 personnes écopent de 10 ans de prison pour avoir manifesté en 2018. Un verdict d'énoncé comme injuste,

Dans une atmosphère lourde d’attente et de crispation, la Cour d’assises de Lomé a rendu, dans la nuit du lundi 3 au mardi 4 février, un verdict qui résonne comme une onde de choc dans le paysage politique togolais. En effet, quatorze personnes, détenues depuis 2018, ont écopé de dix ans de réclusion pour « complot contre la sécurité intérieure de l’État » et « groupement de malfaiteurs ». De plus, le procès, expédié en une journée après six ans d’incarcération préventive, a soulevé une vague d’indignation parmi les défenseurs des droits humains, dénonçant une parodie judiciaire aux allures de règlement de compte politique.

Un procès sous haute tension, un verdict implacable

D’ailleurs, les faits remontent à décembre 2018, lorsqu’un vent contestataire soufflait sur le Togo. Les manifestations, menées par l’opposition et la société civile, revendiquaient une réforme constitutionnelle pour limiter le nombre de mandats présidentiels. En réponse, les autorités avaient proscrit tout rassemblement, imposant une chape de plomb sur la contestation.

C’est dans ce contexte que les accusés ont été arrêtés et détenus sans procès durant six longues années. En conséquence, la justice leur reproche d’avoir bravé l’interdiction en participant à ces rassemblements, bien que les preuves matérielles demeurent lacunaires. À l’issue du procès, la justice a également condamné quatre autres accusés en fuite à vingt ans de réclusion et a émis un mandat d’arrêt international contre eux.

Un dossier marqué par des zones d’ombre et des allégations de torture

Pour la défense, ce verdict est entaché d’irrégularités. Darius Atsoo, avocat des condamnés, ne mâche pas ses mots : « Cette cour d’assises a manqué tout simplement d’audace. » « Elle n’a pas su tirer les conséquences des tortures subies par les accusés. »

Par ailleurs, un autre point crucial, c’est que plusieurs témoignages font état de sévices physiques et psychologiques infligés aux détenus durant leur incarcération. Un argument que la justice togolaise a balayé d’un revers de main, au grand dam des observateurs internationaux.

Le cas d’Abdoul Aziz Goma : un symbole de l’intransigeance judiciaire

Parmi les condamnés, une figure retient particulièrement l’attention : Abdoul Aziz Goma, binational irlando-togolais, arrêté en décembre 2018. Son tort ? Avoir, selon les autorités, financé l’hébergement de jeunes manifestants sans même avoir participé aux manifestations.

En effet, depuis son arrestation, sa détention est dénoncée par plusieurs instances internationales, notamment par la rapporteuse spéciale des Nations unies, Mary Lawlor, qui fustige une « détention arbitraire » assortie de « traitements inhumains ». Sa situation médicale est préoccupante, souffrant d’une pathologie neurologique sévère, aggravée par ses conditions d’incarcération.

Un verdict qui interpelle, une justice sous surveillance

En somme, au-delà des condamnations, ce procès pose une question fondamentale : la justice togolaise a-t-elle su garantir un procès équitable ou s’est-elle transformée en un outil de répression politique ? Pour Esso-Dong Kongah, Directeur Exécutif du Centre de Documentation et de Formation sur les Droits de l’Homme (CDFDH), la réponse est sans appel : « Ce procès aurait pu être une opportunité pour rétablir une forme de justice. » Or, les débats ont mis en lumière des lacunes sur les preuves et des vices de procédure. « Nous aurions souhaité une relaxation pure et simple. »

À l’heure où le Togo tente de redorer son image sur la scène internationale, ce verdict risque de raviver les critiques sur le respect des libertés fondamentales et des droits humains. Loin de refermer la page de la contestation, cette décision pourrait bien aussi devenir un nouveau foyer de tension dans un pays où la quête de justice reste un combat quotidien.

Suivez l'information en direct sur notre chaîne WHATSAPP