Kara, Togo, 13 mars 2025 – Dans la cité vibrante de Kara, à quelque 420 kilomètres de la bouillonnante Lomé, s’est tenue, hier, la deuxième édition de la Journée Nationale de l’Anacarde (JNAT). En effet, Sous l’égide du Conseil Interprofessionnel de la Filière Anacarde du Togo (CIFAT), cet événement a convié les artisans de cette filière, producteurs, transformateurs, commerçants, à une méditation collective autour d’un thème évocateur : Renforcement des capacités productives et commerciales de la filière anacarde : enjeux et défis. Là, sous un ciel chargé d’attentes, les acteurs ont esquissé les contours d’un avenir où la noix de cajou, ce fruit discret, mais puissant, pourrait s’épanouir pleinement au bénéfice du Togo tout entier.
L’anacarde : une filière en quête de lumière
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L’initiative, portée avec ardeur par le CIFAT, s’est donné une mission bicéphale : dévoiler aux habitants de Kara les vertus insoupçonnées de l’anacarde et inciter les Togolais à en faire un mets familier, loin des préjugés d’antan. « Autrefois, ce fruit souffrait d’une aura néfaste, frappé d’interdits fantasques – on le disait incompatible avec le sucre ou le lait », confie Mawuko Komlan Gozan, président du CIFAT, avec une pointe de regret mêlée d’élan. « Pourtant, il regorge de trésors nutritifs. » Cette journée est une tribune pour le dépouiller de ses chaînes mythiques et le parer de ses véritables atours. » Ainsi, au fil des stands et des échanges, la noix de cajou s’est révélée non plus comme une énigme, mais comme un levier de prospérité.
Un pilier économique en pleine ascension
Troisième pilier des exportations agricoles togolaises, derrière le coton et le soja, l’anacarde ne cesse de gravir les échelons. Les chiffres, mis en exergue par Mme Patchali Prénam, directrice préfectorale de l’agriculture de la Kozah, au nom du ministre de tutelle, parlent d’eux-mêmes : de 22 937 tonnes en 2019, la production a bondi à 38 880 tonnes en 2023, un essor de près de 70 % en cinq ans. Cette trajectoire ascendante doit beaucoup à l’engagement des pouvoirs publics, qui, en 2020, ont insufflé 1,5 milliard de francs CFA dans la filière, irriguant ses racines d’un soutien financier crucial. Mais ce tableau éclatant dissimule une fragilité : la transformation, ce maillon essentiel, demeure un défi lancinant.
Le spectre de la valeur ajoutée
Car si la production s’élève, elle s’écoule trop souvent brute vers des horizons lointains. « À peine 10 % de notre récolte est métamorphosée ici », déplore Mawuko Gozan, le regard tourné vers un horizon plus ambitieux. « Les 90 % restants quittent nos terres sans laisser derrière eux l’empreinte d’une richesse accrue. » Ce faible taux de transformation prive le Togo d’emplois, de revenus supplémentaires et d’une présence affirmée sur le marché local, où les produits dérivés peinent à s’imposer face à la concurrence des importations. Le CIFAT, né en 2016 et fédérant cinq groupements à travers le pays, s’est juré d’inverser cette donne, en marchant main dans la main avec un gouvernement résolu à faire de l’anacarde un moteur d’opulence partagée.
L’anacarde : une moisson d’enjeux, une récolte d’incertitudes
En somme, la journée d’hier à Kara n’a pas seulement célébré la noix de cajou ; elle a également reflété les défis qui jalonnent son parcours. Comment hisser la transformation au rang de priorité sans ébranler les équilibres commerciaux ? Comment conjuguer l’élan productif avec une valorisation qui profite aux communautés locales ? Les réponses, esquissées dans les débats, restent des promesses en suspens.
Car si l’anacarde s’impose comme une manne potentielle, elle demeure à la croisée des vents : entre l’élan d’une filière qui s’éveille et les ombres d’un avenir à façonner. À Kara, les graines d’un renouveau ont été semées ; leur floraison, elle, appartient encore aux jours incertains qui s’annoncent.