Dans un mouvement qui confirme la tendance croissante des militaires aux commandes d’institutions clés, le Commissaire Lieutenant-Colonel Komlan Edem Agbenyega Gumedzoe des Forces Armées Togolaises (FAT) vient d’être nommé administrateur provisoire de l’hôtel Sarakawa. Ce joyau balnéaire de Lomé, symbole de l’hospitalité togolaise depuis les années 1980, passe ainsi des mains expertes de Nathalie Bitho à celles d’un officier chevronné, marquant une transition audacieuse entre gestion civile et rigueur militaire.
Le Sarakawa : un phœnix sous gestion éclairée
L’hôtel Sarakawa, niché face à l’océan Atlantique, renaît régulièrement de ses cendres. Sous la direction de Nathalie Bitho, l’établissement avait subi une métamorphose totale en 2020 : rénovation des 100 chambres, modernisation des cuisines, installation d’une piscine olympique unique au Togo et adoption de systèmes écologiques. Ces travaux, financés par une gestion rigoureuse, ont permis à l’hôtel de générer des bénéfices réinvestis dans la restauration de l’hôtel-école Lébénè, autre fleuron réhabilité sous son égide.
Komlan Edem Agbenyega Gumedzoe : un soldat à la croisée des chemins
Diplômé des académies militaires et formé aux enjeux logistiques, le Commissaire Lieutenant-Colonel incarne un profil hybride. Son parcours, marqué par des missions de coordination sécuritaire et des responsabilités administratives au sein des FAT, le destine à pérenniser l’héritage du Sarakawa. « Son arrivée n’est pas un hasard », confie une source proche du ministère de l’Économie et des Finances. « Il s’agit d’insuffler une discipline stratégique tout en préservant l’âme de ce lieu. »
Nathalie Bitho : L’architecte discrète d’une renaissance hôtelière
Avant de passer le relais, Nathalie Manzinèwè Bitho, experte-comptable de formation, a redéfini l’hôtellerie togolaise. Connue pour son pragmatisme et sa vision, elle a restructuré la Chambre de Commerce et d’Industrie du Togo (CCI-Togo), sauvé le Sarakawa de l’obsolescence et orchestré la rénovation de l’hôtel-école Lébénè avec un budget de 3,5 milliards de FCFA. Son mantra : « Transformer les défis en leviers économiques ». Un héritage qui plane désormais sur le Sarakawa, attendant son nouveau capitaine.
Défis et attentes : entre tradition et innovation
Le Lieutenant-Colonel Gumedzoe hérite d’un établissement en pleine santé financière, mais face à des enjeux complexes :
- Concurrence régionale : rivaliser avec les géants ouest-africains tout en gardant une identité togolaise.
- Tourisme post-Covid : relancer l’attractivité dans un contexte de reprise fragile.
- Formation continue : maintenir les partenariats avec les écoles hôtelières, comme Lébénè, pour former une main-d’œuvre qualifiée.
Son approche, mêlant ordre militaire et sens de l’accueil, sera scrutée. « Un hôtel n’est pas une caserne », rappelle un ancien collaborateur de Mme Bitho. « Mais la structure peut bénéficier d’une gestion méthodique. »
Une tendance nationale : L’uniforme au service de la gouvernance
La nomination de Gumedzoe s’inscrit dans une dynamique plus large. Après le Colonel Ouro-Koura Agadazi, nommé ambassadeur en France, et d’autres officiers placés à des postes ministériels ou municipaux, le Togo semble privilégier une gouvernance par la discipline. Une stratégie saluée par certains pour son efficacité, critiquée par d’autres pour son manque de diversité.
Alors que le Commissaire Lieutenant-Colonel prend ses fonctions cet après-midi, Lomé retient son souffle. Entre les murs du Sarakawa se joue une partition subtile : celle d’un pays qui réinvente ses élites, mariant tradition militaire et ambitions économiques. Reste à voir si cette symbiose saura séduire autant les voyageurs que les investisseurs.