Par une concordance céleste scellée dans le calendrier hégirien, le mois sacré du Ramadan s’amorcera le samedi 1ᵉʳ mars 2025, déployant son tapis de dévotion pour près d’un milliard de fidèles. Bien plus qu’un jeûne, cette neuvième lune islamique incarne une odyssée introspective, où l’abstinence se mue en miroir de l’âme.
Les cinq fondations cardinales dans le Ramadan : un pilier nommé sobriété
Parmi les cinq colonnes de l’islam, aumône, pèlerinage, prière, profession de foi, le Ramadan se distingue par son ascèse diurne. De l’aube, marquée par l’énigmatique distinction coranique entre « fil blanc et fil noir », au crépuscule, le croyant s’astreint à une diète intégrale : ni nourriture, ni breuvage, ni fumée, ni intimité charnelle. Une privation sensorielle qui, loin de se réduire au ventre vide, vise à épurer l’intention, filtrer les actes et sublimer l’éthique.
Iftar : quand le soleil cède au partage.
Chaque soir, l’astre solaire dessine un arc de trêve. L’iftar, repas de rupture, sonne l’heure d’une convivialité calculée au quintal de photons. L’horaire, variant selon les latitudes et les jours, transforme les tables en observatoires astronomiques domestiques. Dattes, lait, soupes : ces mets traditionnels ne sont que prétextes à un festin bien plus substantiel, celui de la solidarité.
L’Éphéméride lunaire : une danse de nuances
Prévu pour s’achever entre le 29 et le 30 mars, le Ramadan reste tributaire du ballet capricieux de la lune. La nuit du doute, probablement le 28 février, verra les autorités religieuses scruter l’horizon, chercheuses de ce croissant naissant qui clôturera le jeûne. Une incertitude rituelle, rappelant que la foi s’écrit parfois au conditionnel céleste.
Jeûner pour voir : le paradoxe de la privation éclairante
Le Coran érige ce mois en miroir grossissant de la conscience. En s’abstenant de ce qui est permis (eau, pain, amour conjugal), le musulman est invité à rejeter l’interdit avec une vigueur redoublée. Calomnies, colères, indifférences : autant de brèches dans l’édifice spirituel. « Le jeûne est une armure », disait le Prophète. Mais une armure qui, paradoxalement, rend vulnérable à la faim de l’autre, à sa solitude.
Empathie : la faim comme langue universelle
En mimant la précarité, le croyant ne se contente pas de ressentir : il transpose. L’estomac creux devient un alphabet, déchiffrant les silences des démunis. Cette pédagogie de la privation, maintes fois saluée par des études sociologiques, révèle un islam moins dogmatique qu’expérientiel : et si le paradis commençait dans un corps affamé, mais un cœur comblé ?
Entre calculs et contemplation : L’homme, ce pont cosmique
À l’ère des applications prédisant l’imsak (moment de début du jeûne) à la seconde près, le Ramadan demeure un dialogue entre précision et abandon. Les fidèles, suspendus entre algorithmes et étoiles, incarnent une humanité hybride : technophile, mais mystique, rationnelle, mais en quête d’invisible.
Un mois, des éternités
Qu’il dure 29 ou 30 jours, le Ramadan 2025 ne se mesurera pas en cycles lunaires, mais en métamorphoses intimes. Dans un monde saturé de bruits et de surplus, ce jeûne millénaire offre une cure de désencombrement : vider pour mieux accueillir, taire pour mieux écouter, souffrir pour mieux unir. Une leçon simple, mais à l’amertume salutaire : parfois, c’est en renonçant qu’on se retrouve.