Plusieurs anciens chefs d’Etat africains ont réussi leur reconversion en offrant leurs services pour une paix politique durable sur le continent.En Afrique, ce ne sont pas tous les chefs d’Etat qui s’inquiètent de leur devenir au moment de quitter le pouvoir. Ces dernières années, ils sont nombreux à avoir passé pacifiquement la main à un successeur élu par leurs compatriotes pour entamer une seconde vie. Si certains préfèrent se retirer de la politique et profiter de leur retraite, d’autres choisissent par contre de rester sur la scène internationale pour apporter leur expertise dans la construction d’une Afrique démocratique.
Dans l’Est de la République démocratique du Congo (RDC) par exemple, Uhuru Kenyatta travaille depuis quelques semaines pour mettre fin aux affrontements violents entre l’armée et les rebelles du Mouvement du 23 mars (M23). Après avoir transmis le pouvoir à son successeur William Ruto, il y a un peu moins de trois mois, l’ex-chef de l’Etat kenyan s’emploie pour une résolution de cette crise dans laquelle le Rwanda est accusé de soutenir la rébellion du M23, qui a pris du galon ces derniers mois.
En tant que nouveau facilitateur de la Communauté des États d’Afrique de l’Est (EAC, sigle anglais) pour la paix dans la partie orientale de la RDC, M. Kenyatta mène sa mission avec panache. Il a achevé lundi 14 novembre un séjour de deux jours à Kinshasa, la capitale congolaise, lors duquel il a consulté des ministres, des diplomates ainsi qu’une quarantaine de représentants des communautés des deux Kivu et de l’Ituri. Parmi eux, des chefs coutumiers et des membres de la société civile qui ont fait le déplacement.
De présidents à médiateurs africains
Plus loin, dans la région ouest du continent où plusieurs pays sont perturbés par la violence jihadiste et les séries de coups d’Etat, d’anciens chefs d’Etat y sont sollicités pour la recherche de la paix et négocier des transitions « raisonnables » avec les juntes militaires. C’est le cas de Mahamadou Issoufou qui a dirigé le Niger de 2011 à 2021.
Médiateur de la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (Cédéao) pour le Burkina Faso, où il a d’ailleurs obtenu la réduction de la durée de la transition à 24 mois au lieu des 36 initialement prévus par la junte au pouvoir, il parcourt régulièrement la région puisqu’il est aussi à la tête du Panel indépendant de haut niveau sur la sécurité et le développement au Sahel. Cette mission lui a été « confiée (par) le Secrétaire général des Nations unies en rapport avec l’Union africaine (UA), la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (Cédéao) et le G5 Sahel », expliquait M. Issoufou lors d’une récente audience à Bamako avec le colonel Assimi Goïta, le président de la transition du Mali, un pays où les allers-retours de l’ancien président nigérian, Goodluck Jonathan (2010 – 2015), sont également fréquents en sa qualité de médiateur de la Cédéao.
En Guinée, l’ancien président béninois Thomas Boni Yayi (2016 – 2016) a réussi à rapprocher les positions de l’organisation régionale et la junte militaire dirigée par le colonel Mamady Doumbouya. Après une médiation de plusieurs mois du prédécesseur du président Patrice Talon, les autorités militaires de Conakry ont accepté de rendre le pouvoir aux civils au bout de deux ans en lieu et place des trois ans prévus. « Dans un compromis dynamique, les experts de la Cédéao et de la Guinée ont conjointement développé un chronogramme consolidé de la transition étalé sur 24 mois », s’était réjoui en octobre l’organisation régionale.
Destins tragiques
Ainsi, la liste des anciens chefs d’Etat africains présents sur la scène internationale n’est pas exhaustive. Mais force est de constater que leur destin est plus honorifique que le sort de certains de leurs pairs comme le Burkinabè Blaise Compaoré, les Guinéens Alpha Condé et Moussa Dadis Camara ou encore l’Ivoirien Laurent Gbagbo. Ces derniers ont été obligés de quitter le pouvoir par la rue ou par l’armée avant de connaître des déboires judiciaires.
En Guinée notamment, le procès de l’ex-chef de la junte Moussa Dadis Camara avec une dizaine de co-accusés dans le massacre du stade du 28 septembre 2009 se poursuit à Conakry. Renversé par l’armée un an après son élection pour un troisième mandat, son successeur Alpha Condé vit lui-aussi des moments difficiles loin de son pays. La justice guinéenne a ordonné le 3 novembre dernier des poursuites contre l’ex-président, actuellement en Turquie pour raisons « médicales », et plus de 180 de ses anciens ministres et cadres, pour des faits présumés de corruption.